fedisto
Le problème c’est de s’assurer de la relation cause et conséquence de cette attribution.
Le soucis c’est que très souvent devant une corrélation entre deux évènements (genre IBM rachète Red Hat), tout ce qui est négatif par après va être attribué à IBM. Et c’est souvent une mauvaise approche.
Déjà faire cela, c’est nier la possibilité à Red Hat de prendre cette décision par elle même. Alors que pourtant cette entreprise a déjà pris des décisions controversées et qui ne répondent clairement pas à la pureté idéologique de certains. La communauté du projet Fedora a déjà subi des circonstances difficiles avec Red Hat, tout n’a pas été rose, et cela ne le sera probablement jamais. Pourquoi est-ce qu’avec IBM cela serait finalement différent ? Red Hat a montré comme toute entreprise qu’elle pouvait aussi prendre des décisions controversées voire “stupide” si on veut, tout mettre sur le dos d’IBM c’est finalement glorifier ce qu’était Red Hat avant sans que cela ne soit finalement fondé, Red Hat a fait de bonnes choses, mais a parfois aussi prises des décisions bizarres ou difficiles. Et bien avant qu’IBM n’arrive.
Ensuite, le problème c’est de voir le tableau d’ensemble sur le temps long. Très souvent quand on analyse un rachat de ce type, on se base sur quelques événements ponctuels pour juger au fil de l’eau et sans plus. Sans recul sur le déroulé réel des événements avec plus de contextes pour évaluer une stratégie globale, mais aussi sans prendre la température sur comment ça se passe à l’intérieur de l’entreprise (car après tout, quand tu n’y bosses pas, tu ne le sais pas, tu te bases sur ce qui est public). Il ne semble pas que le management et la manière de travailler au sein de Red Hat ait été bouleversé par le rachat d’IBM. Pourtant c’est ce qui a été prophétisé voire ce que certains soutiennent aujourd’hui à la lumière des événements récents.
Ensuite, prenons du recul. Déjà par exemple on l’oublie un peu mais Red Hat est une entreprise américaine, avec une culture du travail assez différente de chez nous, il n’aura échappé à personne qu’actuellement le secteur de la techn américaine a beaucoup licencié récemment malgré des finances solides. À tort ou à raison, là n’est pas la question, mais pas de raisons que Red Hat agisse différemment. IBM ou pas.
Ensuite dans le cas de l’ouverture des sources. Prenons l’ensemble dans leur contexte sur le temps long. Personnellement je ne suis pas fan de la décision en tant que telle, je pense que le risque en terme d’image ne vaut pas forcément le gain qu’ils peuvent en retirer mais passons. On l’oublie mais à l’origine quand même Red Hat a sauvé CentOS qui était dans une situation régulièrement difficile. La tâche de CentOS est particulièrement ingrate et peu de monde se bousculait pour donner un coup de mains à la tâche. D’ailleurs on verra sur le temps long ce que cela donnera pour AlmaLinux, Rocky Linux, etc. La reprise en main par Red Hat a sans doute évité sa mort définitive. Ensuite le modèle de CentOS a changé. Certains n’aiment pas, mais il y a aussi du positif dans ce changement. Plutôt que d’être une RHEL avec quelques mois de retard, CentOS Stream a maintenant un peu d’avance et tout est public. Avant tu voulais contribuer directement à RHEL en ne travaillant pas chez Red Hat ? C’était compliqué, il n’y avait clairement pas de moyen directe et évident pour cela. Aujourd’hui tu peux contribuer à CentOS Stream. Tu veux tester ton logiciel pour RHEL 10 qui n’existe pas encore ? Dès que CentOS Stream aura la branche de travail à ce sujet, tu pourras tester. Avant il fallait attendre des mois après la sortie de RHEL pour que CentOS ait la bonne version à proposer gratuitement pour les tests.
Du coup on crie au scandale de la “fermeture” de Red Hat alros qu’ils ont en réalité ouvert le développement de RHEL comme jamais. Certes ils mettent dans le même temps un bâton dans les roues pour produire un clone gratuit, mais il ne faut pas oublier le reste qui a été fait. Et à dire vrai, la démarche est cohérente même si on peut ne pas l’approuver et est globalement plus proche d’un modèle OpenSource dynamique qu’avant. Et cette démarche a été entamé bien avant qu’IBM ne mette son nez dedans (le travail sur CentOS Stream a débuté bien avant le rachat).
Du coup je maintiens ma position, à moins qu’un employé de Red Hat ne dévoile les coulisses de ces décisions pour certifier que IBM est à la manœuvre, il ne semble pas spécialement raisonnable de croire que c’est le cas car c’est parfaitement explicable sans. Car la corrélation ne fait pas la causalité et que finalement avec du contexte ces décisions ont aussi un autre sens.
Cela peut d’ailleurs se généraliser à bien d’autres cas, il n’est pas rare que ce qui est dépeint dans la presse ou des commentaires à propos de ce qui se passe dans une entreprise ne corresponde pas spécialement à la réalité car cela ne se base que sur les informations publiques à disposition avec souvent peu de recul ou de contextes. Pour savoir ce qui se passe réellement et être sûr du déroulé des événements, il faut des témoignages de premières mains, de différents employés et même de différentes équipes pour avoir une vision plus exacte de la situation.